Selon Maryse Joissains, Aix est "la cité du bonheur"…
Je ne sais si vous avez l'occasion de vous intéresser au magazine municipal. Et donc, de le feuilleter. Personnellement, ma curiosité m'amène à le faire à chaque parution. Mais je prends la précaution de m'asseoir, pour amortir les chocs.
Je commence toujours par l'édito de Maryse Joissains, une véritable féerie. Ce mois-ci, son titre n'est rien moins que : "La cité du bonheur".
Ensuite, je saute directement à la fin pour découvrir les tribunes politiques de la majorité et de l'opposition. Et l'on y voit systématiquement, même si c'est de bonne guerre, la première dégommer les propos de la seconde qui est contrainte de livrer ses textes bien plus longtemps à l'avance. Quoi qu'il en soit, à part le côté duel convenu, on n'y apprend pas grand-chose, pas plus en tout cas que ce que la presse a déjà raconté dans le feu de l'actualité.
Puis, je passe aux pages "quartiers". Et là, c'est quasiment la consternation. En dehors des classiques événements humanitaires, le reste relève de l'anecdote.
M'armant de courage, je retourne vers le début pour essayer d'en savoir plus sur l'avenir radieux, que dis-je, mirifique, que nous prépare la municipalité. C'est d'ailleurs annoncé en une du magazine : "un sondage explicite" (sic) a établi que "92% des Aixois sont satisfaits de vivre à Aix".
Les détails sont fournis en page 10. Entre 98 et 61% des personnes sondées (par les yeux, le nez, les oreilles) perçoivent, "spontanément" nous dit-on, Aix comme une ville touristique, de patrimoine, universitaire, agréable à vivre, animée, avec une identité forte, un cadre de vie exceptionnel et ont confiance en leur ville.
On aurait pu améliorer les résultats jusqu'à 150% en posant par exemple la question "que pensez-vous du soleil ?" mais l'on n'a pas osé en rajouter sans doute par scrupule d'enfoncer aussi l'ultime porte ouverte de nos mérites séculaires indépendants de notre pouvoir. Oh, à part ça, il y a bien encore quelques vétilles, mais, figurez-vous, ce ne sont que de mineures préoccupations de vie quotidienne.
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Si tous les chiffres, issus d'une enquête téléphonique effectuée par un institut de sondage dans le cadre de la préparation du Plan local d'urbanisme, sont reproduits avec une apparence de grande transparence, on incite incidemment le lecteur à comprendre que, malgré quelques faiblesses, la municipalité y est bien sûr pour quelque chose dans les mérites attribués à notre ville.
Car, que veut dire cette fin de phrase : "pour 47% des Aixois, le cadre de vie s'est amélioré ces dernières années" ? Est-ce seulement entre 2001 et maintenant, ou, plus honnêtement, depuis au moins vingt ans ?
Quelques sujets d'interrogation parmi d'autres
à La loi SRU qui institue le Plan local d'urbanisme date de décembre 2000. Après dix ans de mandat, Maryse Joissains lance la démarche pour Aix qui ne devrait aboutir dans le meilleur des cas qu'en 2012.
à Le siège de la nouvelle université unique sera finalement à Marseille aux dépens d'Aix. Maryse Joissains s'insurge contre ce qu'elle perçoit comme un coup de force. On voudrait bien partager sa colère mais que n'a-t-elle agi avant pour s'occuper sérieusement des universités aixoises et les défendre ? Cela fait des années que la pénurie criante de logements fait fuir les étudiants vers Marseille pour s'y loger moins cher et y rester pour étudier. Le plan Campus, arrivant trop tard pour refaire le chemin qui n'a pas été fait, ne peut maintenant à lui seul servir d'argument d'appoint contre le vote déjà entériné de délocaliser le siège.
à Dans le même ordre d'idée, il n'est peut-être pas inutile de rappeler aussi la gestion catastrophique de l'OPAC Pays d'Aix habitat et l'absence caractérisée de volonté de construire des logements sociaux accessibles aux milliers de familles peu fortunées.
à La réhabilitation des quartiers Corsy et Beisson a pris également beaucoup de retard à cause des réductions de crédit du gouvernement que Maryse Joissains soutient. Si le projet présenté récemment a maintenant le mérite d'exister, il n'est pas assez ambitieux et ne semble pas encore avoir convaincu pleinement les habitants.
à Quant à la mise en vente de l'Hôtel de Caumont, bien de la Ville depuis 1964, classé monument historique depuis 1990, siège du Conservatoire de musique, elle a été opérée comme une affaire commerciale. Ce n'est pas la première fois que la municipalité écoule le patrimoine immobilier public aixois pour le confier au privé. Oui, bon, on a prévu d'y installer des activités culturelles mais avec tout le bazar de services et de produits purement commerciaux. On a vanté la qualité de la société acquéreuse, notamment pour son expérience en la matière. Sauf que, pour l'instant, toutes les structures dont elle s'est assuré la gestion sont la propriété d'institutions publiques et de collectivités territoriales. Aix est donc une exception. Quelles garanties a-t-on qu'il ne soit pas un jour revendu, vu que Culturespaces est une filiale de GDF Suez ? L'Hôtel de Caumont méritait une gestion maîtrisée par la Ville qui aurait pu opter pour une délégation de service public.